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« Ce n’est pas le don qui fait l’amour chrétien, c’est la réciprocité »
Invité par l’Aluc, Emmanuel Tourpe porte un regard sans concession sur la situation du monde mais trouve son réconfort dans la Trinité.
Emmanuel Tourpe est philosophe et théologien, mais il n’en a pas moins les pieds sur terre. Père de quatre enfants et directeur des médias du pôle Outre-mer de France Télévisions, il a été invité par l’Association luxembourgeoise des universitaires catholiques (Aluc), le Centre de Formation Diocésain Jean XXIII et l’École privée Notre-Dame Sainte-Sophie, pour évoquer « La Trinité comme programme politique : aimer comme Dieu aime ».
Le conférencier abat ses cartes dès qu’il prend la parole. « Je vais commencer en vous parlant d’une tectonique des plaques, de la catastrophe à venir. Depuis 2010 à peu près, quelque chose est en train de se produire, qui est observé par ceux qui réfléchissent sur la société, une cassure est en train d’apparaître. » Selon son analyse, les premiers signaux d’alarme ont commencé à clignoter en 1919, à l’issue de la Première Guerre mondiale qui s’est soldée par le démantèlement des grands empires et ce que certaines penseurs appellent la « fin de l’Occident ». En 1947, dans La dialectique de la raison, Max Horkheimer et Theodor W. Adorno affirment que notre modernité est en train de se retourner contre nous. À partir des années quatre-vingt apparaît une société de l’individualisme narcissique. « De l’individu en relation, expose Emmanuel Tourpe, nous passons à un individu qui estime que tout ce qui est extérieur à son monde est un danger. À partir de 2010, on se rend compte que le village global que devait être le Net se transforme en un monde de tribus qui s’opposent les unes aux autres. Le règne de l’émotion a remplacé celui de la raison. Notre société est menacée par quatre guerres : guerre des sexes, guerre des identités, guerre des convictions, guerre des civilisations. »
Un tableau qui semble bien noir… « Heureusement il y a les catholiques ! » s’exclame le conférencier. L’assistance se rassure un moment. Un moment trop bref car, en bon observateur des médias et des réseaux sociaux, Emmanuel Tourpe l’affirme : « Dans un univers où ces quatre guerres règnent partout, dans lequel les réseaux sociaux ne sont que des arènes où l’on s’étripe, la cathosphère est la pire. Alors que le marqueur chrétien, c’est l’amour ! » Quel remède ? « Nous devons nous reconstituer à partir du cœur de notre foi, qui n'est pas la communication mais la communion. Nous sommes appelés à la communion. La communion des saints est le cœur de notre vie chrétienne. Et ce qui fait la communion, c’est l’amour que nous avons les uns pour les autres. » Cette charité doit être ordonnée. Si Jésus nous dit d’aimer notre prochain comme nous-mêmes, c’est qu’il faut d’abord s’aimer soi-même. Puis, quand Il nous dit « aimez-vous les uns les autres », Il met en exergue la réciprocité entre chrétiens. « Ce n’est pas le don qui fait l’amour chrétien, insiste le philosophe, c’est la réciprocité. Dieu n’est pas don, il est Trinité, et dans la Trinité se trouve l’amour réciproque. Le cœur du cœur du cœur de ce qu’est la charité chrétienne, c’est la réciprocité des dons, la communion, le partage. »
S’aimer soi-même, s’aimer les uns les autres. C'est ensuite que l'on peut se faire le prochain de tout homme. « Dans aucune autre religion au monde l’amour universel n’est célébré, remarque Emmanuel Tourpe. Cette universalité de l’amour est profondément chrétienne. » Enfin, et c’est le plus difficile, aimer ses ennemis.
En conclusion de ses propos, l’orateur fait découvrir à l’assistance un tableau réalisé par Sœur Caritas Mueller, dominicaine suisse. On y voit la Trinité représentée comme miséricorde. « Le cœur de la vie trinitaire est communion, la miséricorde est le fruit de la Trinité et l’homme est au cœur de la Trinité. » Ce tableau à lui seul est un enseignement, et une méditation.
Emmanuel Tourpe a publié plusieurs ouvrages. Le plus récent s’intitule À l’amour que vous aurez les uns pour les autres… Il est disponible aux éditions Artège.
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Highlights
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